Quelques explications historiques et anthropologiques
1. LES GNAWA
Les gnawa se définissent à la fois par leur origine ethnique (en tant que confrérie maghrébine issue des anciens esclaves noirs venus de l’Empire du Soudan) et par leurs fonctions (qui peuvent être tant artistiques que religieuses ou thérapeutiques, selon le contexte de leurs interventions).
L’ensemble de leur culture est nommé tagnaouite.
La danse, dans cette tradition, n’a lieu qu’en présence des musiciens. Ils jouent du guembri (instrument mélodique et percussif à cordes pincées, qui trouve ses origines en Afrique subsaharienne), du tbel (tambour joué avec deux bâtons) et des qraqeb (castagnettes en métal).
Les ateliers de danse et de musique afro-gnawa que l'association So Yo Gnawa organise visent à s’imprégner de la gestuelle, des rythmes musicaux et des chants de cette culture. Les chants sont dans une langue qui mêle l’arabe à des dialectes d’Afrique de l’Ouest, témoignant de leurs origines.
Les ateliers permettent également à chacun de se construire un panel d’outils afin de participer pleinement aux soirées, les Lila, qui sont les veillées où la musique et la danse gnawa se pratiquent traditionnellement, et encore aujourd’hui, au Maghreb.
2. LA LILA
L’univers rituel gnawa est structuré par l’identification de 7 énergies principales constituant le vivant, qui sont incarnées par 7 couleurs différentes, que l’on retrouve symbolisées par les 7 couleurs que revêtent les Gnawa. Durant la Lila, le déroulement des 7 couleurs selon un ordre très précis actualise le mythe cosmogonique de la création du monde : Il y a ce désordre d’origine et la Lila est organisée pour remettre de l’ordre.
Au niveau individuel, le but d’une Lila est d'incorporer cette énergie successivement selon le rituel. Les pas du danseur sont en interaction permanente avec la musique, et participent donc de la dimension percussive et répétitive du jeu musical, ainsi que de l’accélération de son tempo. Ainsi, la « remise en ordre » des 7 énergies est rendue possible par la musique et la danse. Traditionnellement, durant la Lila, l'adepte traverse donc une initiation du début à la fin.
L’association So Yo Gnawa organise régulièrement des Lila sans les déposséder de leur sens, dans la perspective de faire vivre de cet extraordinaire patrimoine. C’est pourquoi nous travaillons avec un Maâlem, porteur de la tradition musicale et rituelle, ainsi que son groupe.
Si la musique arrive à se transmettre au Maroc, les danses sont de moins en moins présentes durant les Lila, alors qu’elles sont l’endroit même où la musique s’incarne. Sans ce nouage entre les rythmes, chants, pas de danse, odeurs, couleurs et objets, le risque est de rabattre les Lila à des concerts de musique folklorique. Nous insistons donc particulièrement sur la transmission des danses traditionnelles.